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Ciné-club ambulant, voyage en cinéphilie - Page 30

  • Black panther (Ryan Coogler)

    Je dois à la franchise Marvel l’un de mes pires moments de cinéma récent. On y va pour faire plaisir à quelqu’un, ne pas toujours imposer ses (bons) goûts et on s’en mord les doigts. Age of Ultron, mon dieu ! Un gloubiboulga ultra-numérisé, saturé de dialogues abscons, une véritable horreur qui m’a vacciné pour longtemps contre les films de super-héros. A côté, l’affreuse série des Transformers, c’est fin comme du Claude Sautet ! A chaque fois que passe un Iron man ou un Thor à la TV, c’est devenu un réflexe pavlovien, je zappe. Pas facile, surtout quand un petit garçon rôde, avide de ce genre de films… à huit ans, j’avais bien adoré Rocky IV, ça peut s’arranger avec les années !

    Black panther sur ce blog, après ce que je viens de dire (Marvel, le numérique etc.), il faut assumer. Après tout, le plaisir de cinéma peut passer par ce type de film, d’autant que celui de Ryan Coogler, réalisateur de Creed, n’est pas dénué de fond. De nombreux articles soulignent son contenu politique et la révolution qu’il opère dans les représentations mythologiques. Inutile de pouffer : ce film est un divertissement classique et efficace et oui il est rempli d’éléments intéressants sur les plans politiques et culturels.

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  • Phantom thread (Paul Thomas Anderson)

    Phantom thread n’est pas un film qui se donne facilement. Paul Thomas Anderson a écrit un scénario bien étrange, situé dans une société rigide et codifiée dans laquelle les sentiments ne se disent pas. Aura-t-on décrit son histoire comme une romance entre un grand couturier et une serveuse dans l’Angleterre des années 50 qu’on n’aura pas dit grand-chose. Reynolds Woodcock (Daniel Day-Lewis) et Alma Elson (Vicky Krieps) entretiennent une liaison faite de passion, de fascination et de rapports de force. C’est l’essence même de cette relation qui intéresse le réalisateur, ce sont ces fils invisibles (phantom threads) qu’ils tissent à deux et qui les retiennent l’un à l’autre.

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  • Jusqu’à la garde (Xavier Legrand)

    Ce film, projetez-le dans les écoles, les collèges, les lycées, les facultés. Organisez des débats citoyens après. Pour ce qui est de la TV, il passera sur France 2 dans un an et pourquoi ne pas l’encadrer d’un Thema sur Arte consacré aux violences conjugales ? Ce n’est pas ironique : Jusqu’à la garde est un film instructif, au sujet peu traité par le cinéma. Je me suis creusé la cervelle pour retrouver un film qui en parle et le seul qui me soit venu est… la Couleur pourpre de Spielberg, qui date de 1985 ! Ce film m’avait marqué parce qu’en plus de subir la ségrégation raciale, le personnage incarné par Whoopi Goldberg en prenait plein la gueule par son mari. Sa vie était une litanie de souffrances et l’ami Spielberg n’avait pas lésiné sur le mélodrame. Mais cette violence-ci n’était pas centrale et s’inscrivait dans un contexte plus large d’oppression. Jusqu’à la garde est en quelque sorte une première.

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  • Wonder wheel (Woody Allen)

    Dans le parc d’attraction de Coney Island, sous les yeux de Mickey (Justin Timberlake), maître-nageur, apprenti dramaturge et narrateur, des individus malheureux rêvent à une vie meilleure. Nous sommes dans les années 50 et le parc est en crise. La famille recomposée que Woody Allen décrit sert de refuge financier et affectif pour ses personnages. Ginny (Kate Winslet) est une ancienne comédienne devenue serveuse. D’un premier mariage brisé par son infidélité, elle a eu Richie (Jack Gore), un garçon lunatique aux tendances pyromanes. L’enfant déteste son beau-père Humpty (James Belushi), un forain qui ne dédaigne pas la bouteille et cogne parfois Ginny. Humpty est veuf et a eu une fille, Carolina (Juno Temple), qu’il a toujours adoré. Carolina s’est mariée très tôt avec un gangster, qu’elle fuit en se réfugiant chez son père à Coney Island. Elle compte reprendre des études pour refaire sa vie. Tous y compris Mickey aspirent à l’amour et à la réussite matérielle. Le début du film est comme une ligne de départ pour chacun des personnages.

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  • La douleur (Emmanuel Finkiel)

    La douleur de Marguerite Duras, c’est quelque chose ! Ce livre lu il y a une dizaine d’années est d’une puissance peu commune. C’est un journal, dit-elle. Le récit se déroule à Paris dans les années 1944-1945. La fin du régime de Vichy, la Libération, le retour des prisonniers et déportés. La gestapo a arrêté son mari Robert Antelme en juin 1944. Marguerite fait des démarches à la préfecture pour avoir de ses nouvelles. Rabier, un flic collabo, lui en donne en échange d’on ne sait quoi. Antelme est déporté vers l’Allemagne. Marguerite, qui a une liaison avec Dionys Mascolo, cherche désespérément où. Elle l’attend, jusqu’à la Libération de Paris et son retour des camps. Elle l'aide à reprendre vie, à guérir (ce n'est pas dans le film).

    Elle décrit ce qui passe en elle, la tristesse, la honte, la culpabilité, en même temps que Paris se libère et que l’attente se prolonge. La douleur est un témoignage intime et historique. L’écriture de Duras porte cette douleur tout en maintenant le lecteur dans l’ambiguïté. L’esprit de Marguerite était certes confus mais toute l’époque l’était ! Je me souviens de mon expérience de lecteur surpris par la perméabilité constante entre bien et mal, entre salauds et amis. Après tout, Robert Antelme a été donné par un membre de son réseau de résistance: derrière un visage amical pouvait se cacher un traître…

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  • Three billboards, les panneaux de la vengeance (McDonagh)

    Trois panneaux publicitaires pourrissent au bord d’une route perdue dans le fin fond du Missouri. Cela fait plus de vingt ans qu’ils n’ont pas été utilisés. Mildred Hayes (Frances McDormand), habitant tout près, décide de leur redonner une utilité. Sa fille a été violée et tuée quelques mois auparavant mais le coupable n’a pas été identifié et la police n’a aucune piste sérieuse. Sur ces panneaux, elle va dénoncer l’inaction des flics et provoquer des remous dans cette petite communauté de l’Amérique profonde. Plutôt que d’ouvrir la boîte de Pandore, elle fait revivre les trois panneaux publicitaires d’Ebbing, Missouri.

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