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Ciné-club ambulant, voyage en cinéphilie

  • The substance (Coralie Fargeat)

    A côté de Coralie Fargeat, Julia Ducournau c’est Robert Bresson ! Assister aux 2H20 de The Substance, c’est s’offrir un long délire gore et tape à l’œil. La première pensée en sortant de la séance a été de se dire que cela faisait longtemps que je n’avais pas assisté à un film aussi dégueulasse et ultra-violent, pensée tout de même accompagnée d’un éclat de rire salvateur largement partagé par la salle. A écouter les premiers résumés, je croyais à une réflexion « féministe » et donc critique sur notre inaptitude sociale à accepter le vieillissement du corps féminin, habilement camouflée en film de genre. Le film a tout de même obtenu le prix du scénario à Cannes. A croire que les jurés ont accordé à ce film hyperbolique, divertissant et de très mauvais goût un fond, un propos critique, une… substance ?

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  • The apprentice (Ali Abbasi)

    Après les humains animalisés de Border (2018) puis le tueur psychopathe des nuits de Mashhad (2022), voilà que le cinéaste irano-danois Ali Abbasi évoque une autre figure monstrueuse : Donald Trump ! Le spectateur occidental un peu informé connaît la nature égocentrique, la mégalomanie et le rapport problématique avec la vérité de l’ex et peut-être futur président des Etats-Unis mais sait-il comment tout cela a commencé ? Avant l’homme politique effrayant que le monde connaît, il y a eu le magnat de l’immobilier star de télé-réalité (la fameuse émission The apprentice) mais avant la célébrité, il y a eu un apprenti ambitieux, héritier d’un petit empire new-yorkais et désireux de se faire un nom ou plutôt un prénom autre que celui du méchant paternel, Fred Trump. Voici donc le biopic de celui qui voulait absolument devenir quelqu’un et qui à la veille de l’élection présidentielle hurle au scandale, menace de représailles les distributeurs, le studio et l’équipe du film tant le contenu lui est défavorable. A la fin du film, son personnage le dit en présence du biographe qui va lui écrire son fameux livre « The art of the deal » : il déteste qu’on fouille dans son passé et qu’on fasse de la psychologie à son propos et à celui de sa famille. The apprentice remue justement tout ce que Donald Trump n’a pas envie de voir, la face particulièrement sombre de sa réussite.

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  • Les graines du figuier sauvage (Mohammad Rasoulof)

    Mohammad Rasoulof est sous surveillance des autorités iraniennes depuis 2010. Sa situation s’est dégradée lors du festival de Cannes 2024, quand le régime des Mollahs l’a condamné à 8 ans de prison pour « collusion contre la sécurité nationale ». Il était inévitable que le cinéaste quitte le territoire clandestinement. On imagine un de ces gardiens de la Révolution, soutien de la théocratie et censeur de profession, découvrir horrifié les 2H48 des graines du figuier sauvage. « Traître », « agent de l’extérieur », « mensonges »… ce qui est montré à l’écran ne peut être qu’insupportable pour un pion de ce pouvoir. Même si le film utilise abondamment le registre métaphorique, il ne se cache derrière aucun symbole hermétique ou aucune ambiguïté pour dénoncer la dictature et pour en appeler à son renversement.

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  • Emilia Perez (Jacques Audiard)

    Emilia Perez est un film original. Voilà, c’est dit, on ne peut pas le nier. L’acceptation à minima du film tel qu’il est, passe par l’adhésion du spectateur à un projet d’écriture tout à fait original. Il s’agit pour un réalisateur français et son scénariste (Thomas Bidegain) de proposer une légende mexicaine, celle de la transformation aussi bien physique que morale d’un narcotrafiquant ultra-violent en une femme dévouée et sainte. Avec l’aide de l’avocate qui l’a aidée à changer de vie (Zoe Saldana), Emilia (Karla Sofia Gascon) rachète les péchés de son ancienne existence en devenant femme puis en exhumant les victimes des barons de la drogue. C’est une histoire sainte et tragique comme un pays de tradition catholique marqué par la violence peut en produire. L’insolite réside dans l’histoire, dans le brassage des genres, mais l’argument de l’originalité s’épuise et ne se suffit pas à lui-même. Pendant la majorité du film, je me répétais que c’était du jamais vu comme une méthode Coué car je n’étais pas vraiment convaincu par ce que je voyais.

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  • Les fantômes (Jonathan Millet)

    Belle métaphore que ces fantômes du titre. Jonathan Millet, dont c’est le premier film de fiction après avoir œuvré dans le documentaire, nous parle de ces gens qui aujourd’hui errent dans le monde comme s’ils étaient morts. Hamid (Adam Bessa), syrien réfugié en France, est de ceux-là. Victime comme des milliers de compatriotes d’exactions, de tortures, il est le produit d’une tragédie déjà oubliée. Il a connu la prison de Saidnaya, près de Damas, dont on dit que 30,000 personnes y ont perdu la vie dans les années 2010. En Occident plus personne de parle de la Syrie de Bachar al-Assad, d’autres conflits sont là. Dans ce silence, Hamid est un des fantômes de cette guerre atroce menée par le dictateur, qui a produit aussi bien des victimes que des bourreaux. Jonathan Millet donne une force documentaire au portrait des uns (Hamid, sa mère, Yara) tout en esquissant le portrait des autres.

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  • Cinéclub : Un vrai crime d’amour (Luigi Comencini)

    Une romance prolétaire qui se transforme en mélodrame. Peut-être que cette ébauche de résumé n’est pas tentante à propos d’Un vrai crime d’amour mais précisons qu’il s’agit d’un film de Luigi Comencini datant de 1974 et qu’il vaut largement la peine d’être vu. Quand on évoque Comencini, on cite L’argent de la vieille (1976), excellente comédie avec Alberto Sordi, Casanova un adolescent à Venise (1969), tiré des mémoires de Casanova ou encore L’Incompris (1966), considéré comme un modèle de mélodrame. Sa riche filmographie se caractérise par son éclectisme, une œuvre comme Un vrai crime d’amour en est la preuve.

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