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Cela fait quatre ans que la Finlande est en tête du classement des Etats par indice du bonheur. D’après ce World Happiness Report, étude sérieuse menée sous l’égide des Nations-Unis, les Finlandais seraient les gens les plus heureux du monde. Dans les films de Kaurismäki, cela ne se voit et ne s’entend pas du tout !
Sommé de s’expliquer par son producteur et ses financeurs atterrés devant les premiers extraits de son film, Marc Becker (Pierre Niney) n’a d’autre choix que d’en voler les images pour fuir Paris et terminer le montage dans les Cévennes chez sa tante Denise (François Lebrun). Il emmène avec lui son assistante Sylvia (Frankie Wallach) et sa monteuse Charlotte (Blanche Gardin). Quelque chose se joue pour Marc loin de la capitale : la préservation de son intégrité artistique mais peut-être davantage, son équilibre personnel rongé par la peur de l’échec et la dépression.
On peut faire dire beaucoup de choses au cinéma de Quentin Dupieux, notamment politiques mais lui-même s’en défend : « Alors, politiquement, je ne pense rien, déjà. Il y a des artistes qui s’en chargent et qui sont parfaits. Mais, comme tout le monde, je vois les infos, je reçois tous les pépins de l’époque, ils viennent à moi. » (lire son interview sur le site Trois couleurs du réseau MK2) Effectivement, son cinéma absurde résonne de choses contemporaines, c’était très net dans Fumer fait tousser (2022), farce power-rangers habitée par l’angoisse de la fin du monde. Mais dans le temps assez court de ses long-métrages, qui durent rarement plus d’1h10, il n’est jamais question de discourir sérieusement en s’appropriant un sujet de société. Il y a toujours le goût prononcé du concept absurde, irréaliste, que le réalisateur se plaît à dérouler jusqu’au bout et qui l’emporte sur tout le reste. Son cinéma est comme un jeu nouveau proposé à des acteurs consentants, dont les spectateurs découvrent les règles au moment de la projection. Nous spectateurs sommes toujours un peu les cobayes du cinéma de Quentin Dupieux.
C’est quand même problématique de chroniquer un film qui est le dérivé d’un produit célèbre du marketing américain. Certes, ce n’est pas une surprise car Mattel a supervisé et financé le film de Greta Gerwig mais on ne peut s’empêcher d’y voir un message publicitaire déguisé en production cinématographique. Si Barbie a son film et Mattel pratiquement deux heures pour défendre sa poupée stéréotypée, pourquoi Coca Cola n’aurait pas le droit de créer sa propre saga et de faire passer des messages pro-domo ? « Certes nous avons contribué à l’explosion du diabète et de l’obésité mais ce n’était pas voulu, nous sommes une marque synonyme de plaisir et de liberté depuis plus de 100 ans, il ne faut pas voir le mal partout ! » J’ai vu passer un soir une bande-annonce d’un film avec Matt Damon racontant la « passionnante » histoire de la Air Jordan de Nike, célèbre basket portée par Michael Jordan (Air, réalisé par Ben Affleck, une production Amazon Prime). C’est donc que Hollywood, désespéré de trouver des sujets, puise maintenant ses intrigues dans l’histoire des marques et des concepts marketing… est-ce que les céréales Kellogg’s auront leur grand film hollywoodien ? On a hâte de le savoir.
Si on veut découvrir le « Maestro » Fellini, il faut peut-être commencer par un film plus facile que les conceptuels Huit et demi ou La Dolce vita, par exemple un film témoignant d’une forte empathie avec son personnage principal. De Fellini, je préfèrerai toujours Les Vitelloni (1953) et Les nuits de Cabiria (1958) qui m’enthousiasme à chaque vision. L’empathie en question doit beaucoup à Giulietta Masina qui a créé ce personnage original de prostituée qui se fait constamment avoir par la vie. La première séquence révèle l’essence du personnage. Cabiria gambade au bras d’un homme. Les deux corps filmés de loin miment l’amour et la romance de façon comique. La jeune femme et son amant Giorgio se tournent autour jusqu’à atteindre la rive du Tibre. Elle fait tournoyer son sac à main au-dessus de lui. On devine soudain qu’il va se passer quelque chose. Plouf ! Elle se fait balancer à l’eau par le type et manque de se noyer ! Giorgio est parti avec les sous. C’est l’histoire de sa vie qui est résumée dans cette séquence d’ouverture . Cabiria, dont on apprend qu’elle est prostituée est passée en une seconde de la félicité au malheur. Sa vie suivra donc cette alternance d’illusions et de désillusions sans qu’elle y puisse grand-chose.
J’ai été d’emblée surpris par certains des choix narratifs de Robin Campillo. J’ai souvent apprécié son travail passé (120 battements par minute, Eastern boys) mais ils font que L’île rouge est une œuvre inégale, fascinante et maladroite. C’est Fantômette, héroïne célèbre de Bibliothèque rose, qui ouvre le récit, chronique de l’enfance de Thomas (Charlie Vauzelle) sur une base militaire à Madagascar. On la voit déjouer les plans de ses ennemis dans plusieurs séquences fantastiques qui contrastent avec le reste du film. Ce n’est pas que la petite justicière née en 1961 soit un choix idiot pour un enfant de 8 ans dévorant de la littérature jeunesse au début des années 70 mais sa présence a parfois tendance à nous faire sortir du récit. L’ile rouge navigue entre la description naturaliste d’un milieu replié sur lui-même, les militaires français imprégnés de colonialisme, et des séquences flottantes et esthétiques à la Claire Denis. Le mélange est détonnant,parfois envoutant, parfois stérile.