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The neon demon: fascination narcotique

Travellings lents, musique obsédante, froideur robotique des acteurs, lumière de néon, rythme narcotique. Ai-je vu une publicité de deux heures pour Poison d’Yves Saint Laurent ou un remake languissant du clip Paparazzi de Lady Gaga ? The Neon demon a au choix un fort pouvoir de fascination ou d’endormissement. Peut-être était-ce l’objectif. Voisin de l’univers morbide de Bret Easton Ellis, ce film m’a transformé en un de ces personnages de Glamorama perpétuellement défoncé au xanax ou au zoloft. J’ai donc lutté de toutes mes forces pour ne pas sombrer dans l’indifférence et le sommeil.

Désorientation d’un réalisateur acclamé

Ce qui arrive quand un réalisateur connaît la célébrité culte et l’hubris qui va avec… On parle tout de même du réalisateur de Pusher, une saga criminelle naturaliste particulièrement réussie. Depuis le succès de Drive, Nicolas Winding Refn a largué les amarres d’un cinéma encore intelligible pour une cinématographie ultra esthétisante qui semble en quête de son propre sens. A voir Only god forgives ou the Neon demon, on se demande ce que ces films cherchent à dire et s’ils ne traduisent pas la désorientation d’un réalisateur acclamé, tiraillé entre narcissisme et angoisse. Concernant the Neon demon et son univers de la mode, les termes d’« abstraction » ou d’« art contemporain » me semblent aussi insuffisants que ceux de « critique » ou de « satire d’un milieu ». Le film n’est pas si compliqué que cela à décrypter. NWR s’approprie les codes esthétiques de la mode, milieu factice par excellence, pour parler d’autre chose, vraisemblablement de cinéma et de célébrité (la sienne ?).

Monde voué à la mort

Tentons quelques interprétations. Jesse (Elle Fanning) arrive à Los Angeles pour réussir dans la mode. Très vite prise en charge par Ruby (Jenna Malone), elle rencontre deux top models, Gigi et Sarah, qui jalousent sa beauté naturelle. Elles la jalousent d’autant plus que Jesse n’a aucun mal à s’imposer dans les shootings et à les supplanter. Ajoutons que Jesse se métamorphose en créature glacée au contact d’un prisme (ou d’un losange ?), que Ruby est une maquilleuse de mode et de morgue aux pulsions saphiques et nécrophiles, que Gigi et Sarah sont des parangons de chirurgie esthétique et de cruauté et que le film exhibe ensuite assez lourdement la métaphore du cannibalisme. Monde factice et fétichiste entièrement voué à la célébrité. Monde dévorateur voué à la mort. Le visage statuaire et maquillé d’étoiles d’Elle Fanning évoque une idole païenne en attente de sacrifice. Ce qui est dit ici pourrait s’appliquer au monde hollywoodien : un être pure et doué arrive, il est jalousé et haï parce qu’il possède ce qui ne peut s’obtenir artificiellement. Un système pervers et vampirique le transforme et va jusqu’à le détruire. Ça va jusqu’au gore et c’est franchement dégoûtant. Voilà. J’espère que tout va bien pour Nicolas Winding Refn et qu’il n’est pas en train de sombrer dans la dépression. S’il s’identifie comme je le pense à Jesse (à la blondeur toute danoise), le film n’est-il pas l’autoportrait d’un styliste à la fois enivré par sa virtuosité technique et dégoûté par le système qui le rend célèbre ? Attendons le prochain film pour voir ce qu’il en est.

S’il est peut-être plus profond qu’il n’y paraît, son film baigne en tout cas dans une esthétique hypnotique et criarde dans l’horreur qui a découragé ma bonne volonté. Les longs travellings millimétrés n’ont pas suffi. Et la photographie de Natasha Braier ? J’en ai encore mal à la tête. Que d’effets ! Que d’effets !

Commentaires

  • Déjà que ce film ne m'attirait pas du tout.
    Alors tu as finis de me convaincre que je ne le visionnerai pas.
    En tout cas comme toi, je trouve dommage que le réalisateur prenne ce nouveau chemin ...

  • Effectivement, le film est plastiquement impressionnant mais je me suis souvent ennuyé. Je pense qu'il y a mieux à voir en ce moment (Café society, Elle, ma loute...). J'aimerais bien qu'il revienne à une forme moins tapageuse et plus réaliste

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