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J'aime pas (vivement 2013!)

J’aime pas les films de troupe, de copains. Une fâcheuse tendance du cinéma français qui produit des films d’acteurs pléthoriques, de têtes d’affiche, qui me donnent envie de fuir. Les petits mouchoirs, Nos plus belles vacances, Amitiés sincères bientôt (avec Jean-Hugues Anglade et Bernard Lanvin), le cœur des hommes etc. On parle de la vie, du couple, des petites trahisons entre amis mais on se retrouve à empiler les clichés, les numéros d’acteur et les scènes de repas. On dit « l’homme est volage, enfant gâté, et la femme une éternelle maman trompée » et on reprend une tranche de saucisson. N’est pas Claude Sautet qui veut. Ces films sont souvent mal écrits, pas drôles, poussifs. Chacun y fait son petit numéro. On se dit que les producteurs ont d’abord mis sur le papier des noms d’acteurs avant de se demander quoi leur faire jouer. Quatre mariage et un enterrement (1994) ou Peter’s friends de Brannagh (1992) sont des films de troupe, d’une certaine façon, et pourtant ils sont bien écrits et captivants, sans être des chefs-d’œuvre. Le comble : un pays « littéraire » qui produit à la chaîne des films mal écrits !

 

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J’aime pas les films français avec des comiques à l’intérieur, films qui peuvent d’ailleurs être des films de troupe, de copains. Xavier Demaison, Elie Semoun, Omar et Fred, les KAIRA, Youn, Kad & O, les Robins des bois etc. Un certain type d’amuseur, qui vient en général de la TV, se vautre dans des productions dont le comique tient dans la bande-annonce. Connaissez-vous le théorème de Semoun ? Il dit ceci : « tout film dans lequel joue Elie Semoun est une merde ». J’aime plutôt le comique mais à ma connaissance il n’a jamais joué dans de bons films. Les comiques ne comprennent pas une chose : la comédie est un art exigent, qui demande du rythme, de la rigueur, de l’invention, donc une bonne mise en scène, donc un bon réalisateur. Beaucoup de comédies françaises sont des véhicules promotionnels permettant à des comiques paresseux de percer dans le cinéma. Je dis paresseux parce qu’on ne parle pas de Chaplin qui répétait 50 fois une scène avant qu’elle soit parfaitement drôle. Elles sont souvent réalisées par des tacherons, qui ne font pas d’ombre au casting et au final, le film, une succession molle et mal ficelée de sketchs, est une merde. RRRrrrr ! des Robins des bois, bien que réalisé par Chabat en 2004, par exemple. Autre nullité : le séminaire (2009), dérivé des sketchs TV Caméra café. Ça date mais la production a-t-elle vraiment changé depuis ? La majorité des comiques TV a probablement une culture cinéma qui se réduit aux Bronzés. Réunir quelques rigolos, tout miser sur les dialogues et les situations grotesques, rien sur la mise en scène et l’artistique. Ils n’ont pas compris ces imbéciles qu’il leur faut un Blake Edwards, un Jean-Paul Rappeneau, un De Broca ou un Billy Wilder pour briller, pas un Charles Nemes !

J’aime pas l’inhumanité du cinéma américain à grand spectacle. J’ai envie de voir des personnages, des humains, du peuple, pas des « transformers », des loup-garou ou des oursons qui parlent. Je suis fatigué qu’on me divertisse comme un ado, qu’on me fasse voir des super-héros au lieu de gens ordinaires. Il y a plus d’humanité dans les films Pixar que dans beaucoup de productions grand public et je ne sais pas pourquoi (si en fait je sais un peu). Vol au-dessus d’un nid de coucous (1975) de Forman ou Five easy pieces (1970) de Rafelson étaient des succès publics. Ces films sont drôles, tragiques, leurs héros sont émouvants, pathétiques. Pourquoi le cinéma américain ne produit plus ou très peu ce genre de films populaires ? Avez-vous déjà vu Papermoon (1973) de Bogdanovich ? ou l’épouvantail (1973) de Jerry Schatzberg ? Ce sont des films écrits, subtiles, s'adressant aux spectateurs comme à des adultes. Ça pourrait exister dans le cinéma indépendant mais même là on ne tombe pas toujours bien. Prenons Another happy day (2011), comédie dotée d’un riche casting (Ezra Miller, Ellen Barkin, Demi Moore, Ellen Burstyn etc.), qui raconte un week-end familial. Film de famille typique du cinéma US, fatigant à force d’exhiber les névroses, les hystéries de chaque membre, comme si pour intéresser les spectateurs à une histoire banale, avec des gens ordinaires, il fallait pousser les compteurs du dysfonctionnel au maximum.

J’aime pas la 3D, même pour Avatar qui est un film impressionnant - cela va de soi. Le cinéma n’est pas (encore totalement) une attraction foraine pour adolescent – décidemment j’en reviens toujours à cet âge. Je me fiche d’avoir l’impression que les balles vont m’atteindre ou qu’un piranha va me sauter au visage, d’autant qu’il n’existe pas de films reposant à 100% sur des scènes d’action. Je dois donc regarder une discussion autour d’un bureau ou un personnage buvant un café en 3D, et ça n’a aucun intérêt. Ça me fatigue les yeux de mettre des grosses lunettes et ça n’ajoute rien au fait que le film est bien écrit ou pas. Un film n’est pas (encore totalement) un réservoir à stimuli, il s’adresse aussi à mon intelligence. Sinon, autant placer sous les sièges du cinéma un câble électrique et balancer une décharge de temps en temps.

 

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On l’aura compris, je n’aime pas le cinéma de rupin, le cinéma nouveau riche, qui exhibe comme arguments de vente ses stars, ses casting pléthoriques, ses joujous technologiques, ses tics d’auteur parfois, au détriment d’une écriture, d’une mise en scène. J’ai envie de m’identifier à des humains, j’ai envie d’être projeté dans des situations historiques, sociales, sexuelles que je ne connais pas. J’ai envie qu’on me parle du monde. Trois films en 2012 m’ont procuré cette sensation. Avec Margin call de JC Chandor, j’étais au cœur d’une banque d’affaires américaine, à la veille de la crise financière. Je voyais l’irrationnel, la cupidité, la logique implacable du capitalisme financier. Avec la désintégration de Philippe Faucon, j’observais une cellule islamiste en train de se former, la propagande à l’œuvre, les mécanismes de cette fameuse désintégration sur de jeunes hommes. Je voyais des Mohamed Merah en formation accélérée. Avec Laurence anyways de Xavier Dolan, je partageais les tourments d’un couple où l’homme se transforme petit à petit en femme. J’admirais les choix et les libertés formelles de Dolan, l’exaspération de Suzanne Clément, la douceur de Melville Poupaud. Films intéressants d’une année assez plate, pleine de films manqués, hélas, et de films surestimés. Vivement 2013 !

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